Nouvelles dispositions sur la classification des films : une réforme en trompe l’œil

Marc Le Roy
Docteur en droit
Chargé de cours à l’université de Tours

L’interdiction des films aux moins de 18 ans pose problème en France. Les rares attributions de cette mesure restrictive à un film entraînent systématiquement un début de polémique sur la censure cinématographique qui porterait atteinte à la liberté d’expression des auteurs.
L’interdiction des films aux moins de 18 ans avait disparu du droit français en 1990 avant de faire sa réapparition en 2001 à l’occasion de la polémique entourant la sortie en salles du film Baise-moi. Depuis 2001, 17 films ont reçu ce visa soit une moyenne d’un film par an. Au Royaume-Uni des dizaines de films sont interdits aux moins de 18 ans chaque année sans que cela pose de problème particulier. L’interdiction aux moins de 18 ans peut être attribuée en France à l’initiative directe du ministre de la culture. Ce dernier peut également être forcé d’y recourir pour remplacer un visa moins restrictif annulé par une décision de la justice administrative. L’opinion publique est régulièrement mécontente d’apprendre qu’un juge « décide » d’interdire un film en salles aux mineurs. La situation s’envenime lorsque cette même opinion publique apprend que le juge a rendu sa décision à la suite d’une saisine effectuée par une association d'extrême droite (l’association Promouvoir) qui affiche sa volonté de défendre les valeurs judéo-chrétiennes. Dans cette situation, il est alors pris pour habitude d’opposer, un peu rapidement, la liberté de création des auteurs aux censeurs d'extrême droite. On oublie alors que ce n’est pas l’association Promouvoir qui annule les visas mais bien le juge administratif qui statue en se fondant sur les règles de droit existantes. C’est pour cette raison que le ministère de la culture et le Gouvernement ont décidé qu’il était temps de faire évoluer les textes relatifs à l’interdiction des films aux moins de 18 ans. Après avoir commandé un rapport au président de la commission de classification de l’époque Jean-François Mary, le Premier ministre a édicté le décret du 8 février 2017 ici commenté afin de réorganiser les critères conduisant à l’interdiction des films aux moins de 18 ans. Le chef du Gouvernement a saisi l’occasion de cette réforme réglementaire pour apporter quelques modifications plus générales sur l’attribution des visas de classification et leur contentieux. Outre la présentation des évolutions textuelles, il convient de s'interroger sur leur portée c’est-à-dire sur l’utilité de cette réforme. Il conviendra ainsi principalement de déterminer si ces modifications vont réduire le nombre de films interdits en France aux moins de 18 ans ? En d’autres termes, l’objectif visé par ce décret sera-t-il atteint ? Plus subsidiairement, il conviendra également d’étudier les quelques modifications complémentaires apportées par le décret et de s'interroger sur leur utilité.
Le décret du 8 février 2017 modifie l’état du droit sur trois points : il précise les fondements des mesures de classification (I), renouvelle les critères d’interdiction des films aux moins de 18 ans (II) et accélère le contentieux des visas d’exploitation (III).

La suite dans le numéro d'avril de la revue Légipresse

 

Marc Le Roy

Docteur en droit

droitducinema.fr

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